Introduction :
Dans le cadre du Master 2 Instrumentation Nucléaire, une visite au CEA Paris-Saclay a eu lieu le 15 novembre 2024. Animée par Quentin GENDRE et Alice GUERRA-DEVIGNE ingénieurs-chercheurs au CEA, cette journée a permis aux étudiants de découvrir l’installation OSIRIS, présentée par M. Meden ainsi que le Laboratoire National Henri Becquerel (LNHB), présenté par M. Plagnard et M. Veres. Enfin, la visite s’est achevée au Laboratoire Capteurs et Instrumentation pour la Mesure (LCIM), rattaché à l'Institut CEA List de la Direction de la Recherche Technologique.
Figure 1: site du CEA Saclay
1. L’INB OSIRIS
La visite a débuté avec la présentation du réacteur de recherche Osiris, implanté sur le centre CEA de Saclay. Ce réacteur, possédant une puissance thermique d’environ 70 MW, a été construit en seulement trois ans et mis en service en 1966 avant son arrêt définitif en décembre 2015. Bien que son démantèlement ne soit prévu qu’à l’horizon 2035, il a occupé une place centrale dans la recherche nucléaire pendant plus de 50 ans.
Figure 2: Réacteur OSIRIS
Osiris a permis de participer à l'étude des matériaux et combustibles des centrales nucléaires actuelles et futures, notamment en étudiant le vieillissement des matériaux essentiels comme la cuve des centrales EDF. Son cœur ouvert, situé dans une piscine de 11 mètres de profondeur, permettait d’effectuer des irradiations sous haut flux de neutrons des éléments combustibles et des matériaux de structure des centrales électrogènes. Ces flux de neutrons, bien plus puissants que ceux des réacteurs du cycle électronucléaire, ont également permis le développement d’innovations telles que la fabrication de silicium par irradiation neutronique, une méthode alternative aux procédés chimiques classiques pour la production de composants électroniques.
En parallèle, le réacteur a joué un rôle majeur dans le domaine médical, avec la production de radioéléments à usage diagnostique tels que le 99mTc, utilisé en imagerie médicale.
À terme, ces missions de recherche et de production seront assurées par son successeur, le réacteur Jules Horowitz (RJH), actuellement en construction sur le site de Cadarache.
2. Le Laboratoire National Henri Becquerel (LNHB)
Le Laboratoire National Henri Becquerel (LNHB), situé au CEA Paris-Saclay, est le laboratoire de référence français en métrologie nucléaire. Il établit les références nationales pour l’évaluation de l'activité et de la dose des rayonnements ionisants (en Gray et Sievert).
Figure 3: Irradiateur X, utilisé pour l’étalonnage des dosimètres
Ses missions incluent le développement de détecteurs pour définir ces références et l’étalonnage des instruments de mesure, garantissant ainsi la précision des évaluations dosimétriques dans des domaines variés comme la radioprotection, la médecine nucléaire et l’industrie. Le LNHB effectue également des comparaisons internationales pour vérifier la validité de ses références. Il effectue également l’étalonnage et la caractérisation de dosimètres actifs et passifs, utilisés pour mesurer les doses instantanées ou cumulées reçues par les travailleurs. Ces opérations sont réalisées à l’aide de bancs de rayons X (figure 3) et d’irradiateurs contenant des sources radioactives (60Co et 137Cs), ainsi que de dispositifs spécifiques comme des chambres à paroi d’air et des fantômes d’eau simulant les tissus humains.
3. CISLAB
Lors de notre visite de la plateforme CISLAB (Capteurs et instrumentation avancés), nous avons eu l'opportunité de découvrir plusieurs laboratoires spécialisés, chacun jouant un rôle clé dans le développement de technologies de pointe. Au sein du CISLAB, des systèmes de détection complets sont conçus. Ce processus comprend le dimensionnement, le développement du capteur, sa caractérisation, l'intégration d'algorithmes, et enfin, le transfert aux utilisateurs finaux.
Figure 4: l’évolution de la Nanopix, imageur gamma ultra compact pour la localisation des sources radioactives
Nous avons débuté notre visite par la thématique "Imagerie des rayonnements ionisants" du LCIM qui se concentre sur le développement d'outils pour visualiser les rayonnements gamma et X. Les outils développés permettent de recueillir des informations essentielles telles que la localisation de la radioactivité, son intensité, les doses, ou encore les activités associées. Ces techniques d'imagerie trouvent des applications variées, notamment en radioprotection, dans le démantèlement d'installations, ou lors de situations accidentelles. Au cours de cette première partie de la visite, nous avons assisté à une présentation de Nanopix, figure 2, une caméra gamma à masque codé. Il s'agit d'un système innovant permettant de localiser précisément des points chauds radioactifs en superposant une image visible à une image des sources émettrices, représentées avec un gradient de couleurs. Sa compacité lui permet d’être déployée dans des zones extrêmement restreintes et critiques. De plus, elle peut être embarquée sur des systèmes automatisés tels que des drones ou des robots ce qui permet d'assurer la sécurité des opérateurs en réalisant des mesures de radioactivité à distance, à différents moments d'une intervention.
Ensuite, nous avons visité le plateau de synthèse des capteurs et matériaux scintillants du LCIM, dont l'activité principale est la conception de scintillateurs à base de polymères et de molécules scintillantes, figure 5. Ces matériaux sont destinés à être intégrés dans des sondes de détection pour les rayonnements gamma, neutron, alpha et bêta.
Figure 5: Scintillateurs organiques développés par l'équipe chimie du LCIM
Ce travail est essentiel pour améliorer la sensibilité et la précision des dispositifs de mesure radiologique.
Nous avons également visité le Laboratoire architectures Électroniques, Modélisation et Analyse de données (LEMA) où sont développés des systèmes dédiés à la mesure des rayonnements. Les équipes y réalisent toutes les étapes nécessaires telles que la conception des schémas électroniques, soudage, assemblage, et tests. Ces systèmes sont ensuite adaptés pour une exploitation en conditions réelles, garantissant leur robustesse et leur fiabilité sur le terrain.
Enfin, nous avons découvert le plateau de croissance des capteurs et matériaux diamant du LCIM. Ces matériaux, qu’ils soient intrinsèques ou dopés (généralement au bore), sont utilisés pour créer des dispositifs avancés tels que des biocapteurs, des membranes résonantes permettant de mesurer les variations de fréquence, ou encore des composants électroniques adaptés aux fortes puissances.
4. DOSEO
Pour finir, nous avons visité DOSEO, la plateforme des technologies pour la radiothérapie et l’imagerie, qui a commencé ses opérations le 1er octobre 2014. Cette plateforme permet à tous les acteurs du domaine médical d’accéder aux équipements les plus récents. Elle vise également à développer de nouvelles technologies pour des systèmes futurs, à maîtriser ces systèmes pour assurer des traitements sûrs et efficaces, à former les étudiants et les professionnels, et finalement, à faciliter les échanges entre les professionnels, les industriels et les régulateurs de la radiothérapie.
Figure 6: Machine de PET-Scan
En 10 ans d’activité, DOSEO a développé un large éventail d’expertises :
- En simulation, avec le développement de codes Monte-Carlo pour les différentes méthodes de traitement du cancer, la conception de logiciels de contrôle dosimétrique in vivo et la création de logiciels d’optimisation des doses délivrées pour diverses techniques d’imagerie nucléaire.
- En reconstruction d’images, avec le développement d’algorithmes capables de reconstruire de l’imagerie multimodale.
- En instrumentation, avec par exemple le développement d’un dosimètre diamant qui est caractérisé par un petit volume et une grande sensibilité.
Conclusion
Cette visite a permis aux étudiants du M2 Instrumentation nucléaire de l’université de Bordeaux, d’en apprendre plus sur les avancées scientifiques et technologiques au service des applications nucléaires. Cela permet également d’appréhender le rôle central du CEA dans la recherche, l’innovation, et la formation dans des domaines aussi variés que la radiothérapie, la métrologie nucléaire, et le développement de capteurs avancés. La promotion 2024-2025 tient à remercier le CEA Paris-Saclay et toutes les personnes ayant coordonné les visites : Alice GUERRA-DEVIGNE, Quentin GENDRE, M. MEDEN, M. PLAGNARD, M. VERES, Giulia ROSSO, Pauline VERGNORY, Gwenole CORRE et Oumaima ZAKI. Nous remercions également l’Unité de Formation de Physique et l’équipe pédagogique pour avoir rendu cette visite possible.