Cela fait des siècles que les phénomènes physiques font l’objet de multiples questionnements. Leur compréhension, ainsi que leur exploitation en industrie et en société, sont synonymes de défis pour la communauté scientifique. Nous avons coutume d’entendre parler des découvertes des Prix Nobel qui relèvent de l’exploit et du génie. Mais qu’est-ce qui pourrait être plus intéressant et visuel que les ondes gravitationnelles, les oscillations des neutrinos, les forces optiques…?

 Eh bien, ce sont les tâches de café !

Qui aurait cru que les tâches quotidiennes de café allaient ouvrir un domaine de recherche fondamentale et appliquée comprenant plus de 3000 articles avec 200 chercheurs d’environ 100 pays différents (sur les 20 dernières années) [1,2] ? Une revue scientifique s’appelant « Drying Technologies » a même vu le jour !

L’intérêt que la communauté scientifique porte à cet effet que nous pouvons observer tous les jours a émergé durant la fin des années 90 par la description expérimentale (puis théorique au début des années 2000) du mécanisme amenant à ce dépôt annulaire de grains de café [3]. Le mécanisme est simple : une goutte d’eau, déposée sur un solide à l’air libre, s’évapore naturellement tant que la météo indique un taux d’humidité (ou hygrométrie) inférieur à 100%. Cela vient du fait qu’à la surface de la goutte d’eau, les molécules d’eau sont très concentrées (état liquide), alors qu’à l’air libre, elles le sont moins (relatif à l’hygrométrie). De par ce gradient de concentration, les molécules d’eau se diffusent en dehors de la goutte. C’est exactement le même phénomène que l’on voit quand on place une goutte d’encre dans un verre d’eau.

Mais ce n’est pas tout !

Ce mécanisme de diffusion, régissant l’évaporation (transition plus ou moins facile de l’eau liquide en eau vapeur), n’est pas homogène sur toute la surface de la goutte. En effet, grâce au fait que la goutte de café présente une forme bombée et une ligne de contact fixe (dû aux forces de surface), il est plus facile pour l’eau de s’échapper sur les bords ! Ainsi, le jeu des robinets commence ! La perte de masse est plus grande au bord qu’au centre. Ainsi, par conservation de la masse, des écoulements d’eau se créent au sein de la goutte emportant les grains de café vers les bords.

Voilà un effet quotidien qui… sert à quelque chose !

Par conséquent, en combinant évaporation d’un fluide et suspension de particules, il est possible de déposer les mêmes particules sur un substrat (surface solide). Le défi actuel de la recherche est de pouvoir contrôler les écoulements à l’échelle micrométrique dans des solutions évaporantes, ce qui permettrait la conception de nouveaux matériaux fonctionnalisés. En effet, le café n’a pas d’application majeure à part à décorer nos tasses (et nos chemises). Cependant, imaginez que l’on puisse revêtir des surfaces avec des particules d’or pour faire des circuits électriques/thermiques particuliers, des biomolécules pour faire des capteurs enzymatiques, ou encore des particules de silice pour créer des fibres/verres optiques optimisés, et ce à l’échelle du micromètre ! Alors nous pourrions assembler n’importe quel matériau afin de lui donner n’importe quelles propriétés physiques.

[1] https://sciencetonnante.wordpress.com/2012/04/16/lorigine-des-ronds-de-cafe/

[2] Informations tirées de la base de données Scopus avec, seulement, comme mots clés : Drying Drop.

[3] R.G. Larson, Transport and Deposition Patterns in Drying Sessile Droplets, AIChE Journal May 2014

Mise à jour le 24/10/2019

Auteur

Nicolas-Alexandre GOY Doctorant au LOMA