L’expérience des doubles fentes d'Young avec un canon à électrons

Cette expérience est fréquemment citée comme la plus belle de toute la physique. Ce qualificatif vient du fait qu’elle illustre parfaitement la dualité onde-corpuscule, principe fondamental de la physique quantique.

Fentes de Young

A l’origine, c’était une expérience de pensée proposée par Richard Feynman comme introduction de son cours. Elle fut réalisée telle qu’imaginée seulement en 2013 par un groupe américain. Remontons un peu la genèse de cette expérience.

Au 17ème siècle, Newton et Huygens s’affrontent sur la nature de la lumière : pour le premier, la lumière est un flux de petites particules alors que pour le second, il s’agit d’une onde. La vision corpusculaire sera préférée jusqu’au début du 19ème siècle. En 1801, Thomas Young éclaire une double fente avec un faisceau de lumière et place un écran derrière les fentes. Il observe sur l’écran une alternance de zones claires et sombres que l’on appelle franges d’interférences. Seule une nature ondulatoire de la lumière permet d’expliquer ce phénomène et la vision de Huygens est adoptée.

Au cours du 19ème siècle, l’électron est découvert et sa nature corpusculaire est établie : c’est une particule élémentaire chargée. Le fait qu’elle soit chargée permet d’influencer sa trajectoire avec un champ électrique, c’est notamment le principe de fonctionnement du tube cathodique qui se cache derrière nos vieilles télévisions.

Si l’on peut contrôler leur trajectoire, on peut diriger le flux vers la double fente ! Première surprise, si l’on fait l’expérience, on observe une alternance de zones claires et sombres sur l’écran, ce qui rappelle fortement le motif observé avec la lumière ! Bon, à la différence de la lumière les électrons sont des particules chargées. Et qui dit chargées dit qu’elles peuvent s’influencer les unes les autres, ce qui peut être à l’origine du motif observé. D’où l’idée de diminuer drastiquement le flux d’électrons pour qu’ils n’arrivent qu’un à un sur l’écran.

Dès lors, il est impossible de considérer que la trajectoire d’un électron est influencée par celles des autres. Dans ces conditions, on observe les impacts des électrons l’un après l’autre sur l’écran et de façon assez spectaculaire on voit le motif précédent se dessiner peu à peu. Certaines zones vont recevoir beaucoup d’impacts alors que d’autres aucun. Pour essayer d’en savoir plus sur ce phénomène, on peut essayer d’obstruer une des fentes pour ne sélectionner que les électrons passant d’un côté. Que ce soit avec l’une ou l’autre des fentes, le résultat est le même : le motif est détruit et l’écran est éclairé de façon uniforme. Le résultat de la double fente n’est donc pas égal à la somme des résultats des deux fentes ! On peut également essayer de savoir par quel côté l’électron est passé sans pour autant l’empêcher de passer (on appelle ça une expérience de type « which way », mais là aussi, le motif est détruit !

Le résultat de cette expérience est fortement contre-intuitif si l’on n’a jamais fait de physique quantique où tous les objets, y compris l’électron, ont une double nature onde-corpuscule. Seule cette double nature permet de prédire de façon satisfaisante les résultats de cette expérience.

Sylvain Larroque

Pour en savoir plus à ce sujet :

Mise à jour le 25/02/2020

Auteur

Sylvain Larroque, Doctorant au CELIA