A l'ascension du doctorat

Il ne va pas sans dire qu’effectuer un doctorat est une épreuve d’endurance de trois ans. Cela demande souffle et concentration, comme pour un trail dans les Pyrénées. Car chaque thèse est une montagne différente...

Il ne va pas sans dire qu’effectuer un doctorat est une épreuve d’endurance. Longue de trois ans (au minimum), elle demande souffle et concentration.

Comme pour un trail dans les montagnes des Pyrénées, on peut commencer le doctorat par de petites foulées sur un relief assez doux, prendre son rythme, trouver sa respiration. Un échauffement durant lequel on voit la montagne de travail se dessiner au loin dans toute la complexité de sa géographie : pentes raides, arrêtes affutées à franchir prudemment, lacs d’altitude à contourner, neiges moelleuses revigorantes qui selon la saison peuvent se transformer en de redoutables plaques de verglas, vallées verdoyantes baignant au soleil, falaises à pic au pied desquelles se trouve un abri sous roche.

Chaque thèse est une montagne différente, loin s’en faut de regarder ses voisins courir pour savoir comment s’y prendre. Peut-être commenceront-il par franchir un large torrent à la nage alors que nous garderons les pieds au sec. Et pendant que nous escaladerons piolets en mains et crampons aux pieds un mur de glace, certains prendront le soleil le dos appuyé sur un mouton endormi. À quelques kilomètres, la météo n’est plus la même et certaines montagnes abritent un micro climat qui leur est propre. À chacun de comprendre et de s’adapter à son environnement.

Néanmoins, il est important de se dégager un espace où l’on se ressource, qu’il vente, qu’il neige ou qu’il fasse grand beau. S’engager dans un doctorat sans cela reviendrait à partir en montagne sans nourriture et espérer se contenter des plantes et baies comestibles trouvées sur son chemin. Les premiers temps, il est évidemment possible de tenir sur ses réserves. Quelle énergie déployée ! Mais très vite on s’amaigrit et la montagne paraît plus haute et le sommet toujours plus loin. La pente se raidit au fur et à mesure et l’oxygène se fait plus rare.

Il existe un moyen de s’oxygéner vieux de plusieurs siècles, une méthode ancestrale qui a évolué avec son temps : le yoga. S’initier à cette discipline, c’est créer un espace à l’intérieur de soi que l’on emmène partout. B. K. S. Iyengar, initiateur du yoga Iyengar disait « Les seuls instruments dont un yogi a besoin sont son corps et son mental ». Notre corps devient l’objet même de notre détente et notre mental la source de notre repos. Cela ne pèse pas lourd dans le sac et quelles que soient les conditions dans lesquelles on se trouve, cela vient créer des points de chaleur, adoucir des zones dures, défaire des noeuds mentaux. La complexité corporelle du yoga vient trancher avec la complexité intellectuelle de la thèse. A chacun sa manière de recouvrer de l’énergie. Certains attendent d’être à bout de souffle, d’autres s’initient dès le départ. Et ce n’est pas tout d’atteindre le sommet et d‘admirer la vue embellie par l’effort fourni, encore faut-il garder de l’énergie pour la descente car on est toujours fatigué après une belle thèse.

Antonine Rochet

Mise à jour le 22/03/2018

Auteure

Antonine Rochet, doctorante au CELIA